Publié le 23/02/2011 à 23:07
L'agressivité manifestée par un patient Alzheimer a de quoi dérouter. L'entourage éprouve souvent des difficultés à comprendre ce comportement et, a fortiori, à réagir de manière adéquate.
Lorsqu'un patient atteint d'une démence d'Alzheimer arrive au stade dit modéré à sévère de la maladie, il peut exprimer un comportement agressif. Dans un premier temps, cette agressivité se manifeste souvent de manière verbale. Il va par exemple hausser le ton, il peut aussi hurler des propos pas toujours clairs, se montrer insultant ou revenir avec insistance sur de vieilles histoires imaginaires ou oubliées de tous… L'animosité peut alors éventuellement, mais pas nécessairement, dégénérer en violence physique. Cependant le simple fait de taper sur la table ne doit pas automatiquement être interprété comme une violence physique. Il peut s'agir simplement d'un moyen utilisé par le patient Alzheimer pour attirer l'attention de son interlocuteur.
Le Dr Jean-Christophe Bier, neurologue spécialisé dans le traitement de la maladie d'Alzheimer à l'hôpital Erasme (Bruxelles), précise que le comportement agressif constitue généralement l'expression d'un mal-être, d'une angoisse chez le patient. Pour diminuer l'agressivité, l'entourage devrait, idéalement, arriver à en comprendre l'origine, une tâche souvent ardue cependant.Etant donné le caractère fréquemment anxieux de la personne présentant une maladie d’Alzheimer, l'entourage devrait tenter au maximum de la rassurer afin de diminuer cette anxiété, et autant que possible ne rien faire qui puisse la brusquer. Ainsi par exemple, certaines infirmières, habituées à soigner des patients Alzheimer, ont remarqué qu'elles pouvaient établir un climat de confiance avec le patient en lui chantant de vieilles chansons connues, une piste parmi d'autres. Quelle que soit la manière, créer un environnement rassurant demeure donc une priorité.
Face à une manifestation d'agressivité, le Dr Bier conseille aux proches de se retirer, dans la mesure du possible, de la pièce durant 5 minutes. S'absenter ne revient pas à nier l'agressivité, c'est laisser au patient la possibilité d'exprimer cette agressivité sans le confronter à une résistance.
Dès qu'une personne souffre de démence, son entourage a tendance à se focaliser sur toutes les choses que le patient n'est plus capable de réaliser. Or l'agressivité traduit chez le patient Alzheimer une activité qui prouve sa capacité de réagir à certains stimuli, et donc de les appréhender, même si cette réaction n'est pas forcément adéquate. Pour l'entourage, cette agressivité pourrait dès lors être considérée comme un point positif. Un signe de vie cérébrale active. Cette démarche implique un gros travail sur soi de la part de la famille. Accepter l'agressivité du patient, c'est aussi accepter implicitement que la personne est véritablement malade.
En règle générale, un accès d'agressivité survient en réaction à un élément qui perturbe le patient. L'agressivité peut devenir chronique lorsque cette perturbation se prolonge, par exemple un placement en institution mal vécu par la personne Alzheimer. D'où l'importance de tenter d'intégrer le patient dans cette décision. Une théorie malheureusement pas toujours facile à mettre en pratique et pourtant indispensable aussi pour son versant éthique.
Les solutions médicamenteuses existent pour gérer l'agressivité. Une diminution des comportements agressifs et autres troubles du comportement est décrite après usage des médicaments utilisés pour traiter la maladie d'Alzheimer, comme les anticholinestérasiques ou la Mémantine. Des médicaments plus spécifiquement utilisés pour diminuer les manifestations agressives existent aussi mais ils ne représentent pas dans ce cas une solution pour combattre la maladie elle-même. En diminuant l'agressivité, ces médicaments vont, bien souvent, soulager plus l'entourage que le patient lui-même.Leur utilité n'en demeure pas moins évidente: si l'accompagnant ne va pas bien, il ne sera pas à même de gérer le patient de manière adéquate.
S'il n'existe pas à proprement parler de formations pour apprendre à bien réagir, le Dr Bier rappelle que rencontrer des personnes confrontées à des situations similaires, via des associations de patients par exemple, peut aider les gens à comprendre qu'ils ne sont pas les seuls à vivre ces situations et que cette agressivité n'est donc pas dirigée contre eux.D'autre part, se rendre dans une maison de repos spécialisée et y proposer ses services pour une ou plusieurs journées permettrait de se familiariser à la manière de réagir des gens habitués à côtoyer les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer. Accepter la personne dans son ensemble, sans se focaliser sur son comportement agressif, favorise la reconnaissance de l'individu et cela, même les patients déments le sentent bien.
Tous nos remerciements au Dr Jean-Christophe Bier, neurologue à Erasme, pour sa précieuse collaboration.Partager et imprimer cet article
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