Greta Bolle: De par leur fonctionnement sexuel, les hommes sont très vulnérables. Là où une femme peut simuler, un homme ne peut tout simplement plus avoir de rapports. Un problème d’érection est dès lors par définition un problème de couple. Ce qui signifie que la vie sexuelle du couple est perturbée et qu’il faut trouver un nouvel équilibre. La meilleure façon d’y arriver, et aussi la plus efficace, est d’en parler. Quand toute conversation est impossible, le couple en vient fréquemment à ne plus avoir aucun contact sexuel. Ce qui mène à la solitude et à l’isolement.
GB: Faire preuve d’empathie est une bonne façon d’aborder le problème. Par exemple: «J’ai remarqué que cela ne marchait pas vraiment ces derniers temps, cela ne doit pas être facile pour toi». En prononçant ces paroles, vous créez une ouverture par laquelle les sentiments peuvent s’exprimer. Vous pouvez aussi parler des vôtres en expliquant la façon dont vous vivez cette situation.
Vous lancer des reproches, vous fâcher, provoquer disputes et discussions ne sont d’aucune aide. C’est souvent là qu’il y a des frictions. Je sais, par expérience, que les gens font souvent preuve de peu d’empathie. Les femmes se sentent flouées. Elles sont en colère contre leur mari parce qu’elles ne reçoivent plus ce qui est important pour elles: la satisfaction sexuelle. On obtient souvent même l’effet contraire: on évite tout contact corporel.
GB: Je fonctionne comme une sorte de «facilitateur», quelqu’un qui amorce la conversation. On crée une sorte de contexte neutre: en ma présence, les personnes osent moins se mettre en colère, elles s’expriment plus souvent sur un ton neutre. Elles s’écoutent aussi car si l’une passe à l’attaque, l’autre n’entend plus et se met immédiatement sur la défensive. Je laisse les couples exprimer et répéter dans leurs propres mots ce qu’ils ont compris de notre entretien.
GB: Tout à fait. Si on choisit une pilule facilitatrice de l’érection, il est aussi important de découvrir comment l’homme et la femme le vivent. D’autre part, je discute aussi avec eux de l’importance accordée à la pénétration. Car, qu’est-ce que le sexe en fin de compte? Créer un lien intime et se donner mutuellement du plaisir. Pour le matérialiser, le couple doit former une équipe. Il faut supprimer ce stress de la pénétration en recherchant des alternatives. Les deux partenaires doivent-ils toujours être comblés au même moment? Ou alors l’homme peut-il donner du plaisir sexuel à sa compagne d’une autre façon, avec les doigts, la bouche… et cela ne s’arrête pas là! L’objectif est bien de maintenir une sorte de connexion entre les deux personnes. Et qu’elles ne nient pas tout ce qui a trait au sexe.
Cet article a été rédigé avec la collaboration de Greta Bolle, sexologue-thérapeute relationnelle, Bruxelles.
"Quelques jours avant mon 52e anniversaire, j'ai fait analyser mon taux sanguin de PSA. Par précaution: mon père et mon oncle ont eu un cancer de la prostate... Cette première analyse des taux de PSA a révélé l'existence d'un risque de cancer. Sept mois plus tard, après d'autres analyses du taux de PSA, des biopsies, une échographie et un toucher rectal, le diagnostic était confirmé: j'étais atteint d'un cancer de la prostate à évolution rapide. Dans mon cas, la prostatectomie – l'ablation de la prostate - était le meilleur traitement.
Comme tous les hommes opérés de la prostate, j'ai souffert d'incontinence urinaire après l'intervention. Heureusement, plusieurs mois de kinésithérapie m'ont permis de solutionner ce problème."
"Avant l'intervention, j'avais longuement parlé avec mon urologue d'une autre conséquence importante du traitement: l'impuissance. L'opération peut en effet endommager les nerfs qui vont de la prostate au pénis. S'ils sont relativement épargnés, des médicaments peuvent permettre de retrouver des érections de qualité. J'ai dû attendre six mois après la prostatectomie pour tester mes capacités sexuelles. Lors de cette "première fois" avec mon épouse, j'ai pris une pilule contre les troubles de l'érection à peu près une demi-heure à l'avance. Je n'ai pas eu de sensations bizarres, tout était totalement naturel."
"Après cette première fois réussie, j'ai continué à prendre des médicaments contre les troubles de l'érection. Avant l'opération, je ne m'étais pas vraiment soucié de mes érections. L'important était que l'opération se passe bien et que je sois débarrassé de mon cancer. Mais je pense que ce problème d'impuissance aurait pesé à terme sur mon moral. Ma femme n'en aurait jamais fait un problème, mais moi, quinquagénaire en pleine forme, je sais que cela aurait fini par me gêner."
Article réalisé avec la collaboration du Pr H. Claes, spécialiste des dysfonctions sexuelles à l'UZ Gasthuisberg, Louvain.
Le cancer en lui-même n’a pas d’impact direct sur la capacité érectile. Mais son traitement peut effectivement provoquer des troubles de l’érection.
On opte dans la plupart des cas pour la chirurgie, c’est-à-dire une prostatectomie radicale. Après cette opération, qui consiste en l’ablation de la prostate et des vésicules séminales, le patient ne peut plus éjaculer… Ce qui n’est pas problématique pour sa capacité érectile, puisqu’il est possible d’avoir une érection et un orgasme même sans éjaculation. Cependant, cette intervention chirurgicale ne permet pas toujours de conserver les nerfs érecteurs. Et ces nerfs qui s’étendent à la surface de la prostate sont fondamentaux pour obtenir une érection. En effet, ils dilatent les vaisseaux sanguins du pénis sous l’effet de l’excitation sexuelle. Comme ils innervent la surface de la prostate, le risque est grand qu’ils soient endommagés. 60 à 90% des patients n’ont dès lors plus d’érections après avoir été opérés.
C’est exact. L’effet de la radiothérapie, contrairement à la chirurgie, n’est pas immédiat. L’atteinte des nerfs érecteurs est progressive. En général, les troubles de l’érection ne se manifestent qu’après deux à trois ans. Autre option thérapeutique, le traitement hormonal peut aussi entraîner une dysfonction érectile. Dans le cadre de ce traitement, auquel on recourt pour les cancers avancés, le taux de testostérone est réduit à zéro… Et cette absence de testostérone fait baisser la libido et provoque dès lors des troubles de l’érection.
Tout à fait. En cas de tumeur localisée et éloignée des nerfs érecteurs, le chirurgien peut procéder à une prostatectomie épargnant les nerfs. Mais, même après cette intervention, le patient peut être atteint de dysfonction érectile…
Les médicaments oraux facilitateurs de l’érection (sildenafil, tadalafil, vardenafil) peuvent aider quand le patient ne récupère pas complètement sa capacité érectile après une prostatectomie épargnant les nerfs. En cas d’échec de ces médicaments, l’érection peut être facilitée par des injections intra-caverneuses. Le patient injecte le produit dans les corps caverneux de son pénis afin de susciter une érection artificielle. En tout dernier recours, on peut encore procéder à la mise en place d’une prothèse pénienne.
Article publié le 04/07/2014.
"En cas de dysfonction érectile, il s'agit en règle générale d'une combinaison de plusieurs éléments. Les facteurs psychologiques joueront toujours un rôle, mais ils ne sont la plupart du temps pas la seule cause. Chez de nombreux hommes, nous constatons qu'un problème organique est également à la base de leur dysfonction érectile. Une érection suffisante nécessite tant une bonne vascularisation qu'une innervation efficace du pénis. Il peut donc y avoir une anomalie sur ces deux plans. Il faut surtout penser aux causes cardiovasculaires: diabète, hypertension, tabagisme, excès de cholestérol... de la dysfonction érectile."
"La première étape est naturellement d'en parler avec son médecin traitant. Il n'est jamais facile de parler d'un problème aussi délicat qu'un trouble de l'érection, mais il faut vaincre cet obstacle. Le médecin traitant est la personne la plus indiquée pour évaluer l'existence éventuelle d'une cause organique, et pour donner des conseils. Le cas échéant, il peut également prescrire un médicament, qui s'avèrera efficace chez la plupart des hommes."
Il faut distinguer deux types de phimosis: le phimosis du très jeune enfant, et celui de l’adulte. Dans le premier cas, il s’agit d’un phénomène physiologique naturel, qui concerne la grande majorité des nourrissons. Des petites adhérences empêchent la peau du prépuce de coulisser sur le gland. Généralement, le phimosis disparait naturellement pendant les 3-4 premières années, notamment lors d’épisodes d’érection.
Dans le deuxième cas, chez l’adulte (souvent âgé), le phimosis survient alors que le décalottage ne posait pas de problème auparavant. Un petit anneau fibreux se constitue. Il s’agit d’un léger durcissement circulaire de la peau du prépuce, qui réduit son élasticité. Ce type de phimosis peut avoir différentes origines: un manque d’hygiène, un diabète ou des maladies de la peau (la plus fréquente étant le « lichen plan »1).
Le phimosis des très jeunes enfants n’a généralement pas de conséquences. Mais s’il subsiste après 5-6 ans, il arrive qu’il pose problème. Uriner peut devenir difficile. Des douleurs peuvent également survenir lors de l’érection. Enfin, le décalottage nécessaire à une bonne hygiène peut causer des petites macérations sous la peau du prépuce, et à longue des infections de type balanite (responsable de rougeurs et d’une inflammation du gland).
Chez les adultes, les effets sont relativement similaires: difficultés à uriner (dysurie), douleurs à l’érection qui peuvent perturber sérieusement l’activité sexuelle, et infections. Le phimosis de l’adulte augmente en plus le risque de développer un cancer de la verge. Il est donc essentiel de consulter un urologue lorsqu’il se présente.
Pour les jeunes enfants des crèmes de type dermatocorticoïdes, appliquées sur le sommet du gland sont généralement conseillées. Elles permettent de libérer les petites adhérences et un décalottage-recalottage peut alors être effectué, en douceur avec une crème anesthésique locale.
Pour les enfants plus âgés (après 5-6 ans) ainsi que pour les adultes, le médecin propose généralement d’opérer et de pratiquer une circoncision. Une partie ou l’ensemble de la peau du prépuce est ôtée, permettant une meilleure hygiène du gland.
Lorsqu’une maladie dermatologique de type lichen plan est à l’origine du phimosis, un traitement spécial à base de crèmes topiques anti-viraux est prescrit..
Il est essentiel de préciser qu’un décalottage forcé et brutal est déconseillé que ce soit chez l’adulte ou chez l’enfant. Il risque d’être à l’origine d’un paraphimosis, phénomène inverse et également douloureux, pendant lequel la peau du prépuce enserre la base du gland et rend son recalottage impossible.
(1) Maladie dermatologique caractérisée par l’apparition de petites taches blanches sur la peau, et dont les causes sont inconnues.
"Il est d’abord essentiel de ne pas confondre trouble de l’érection et simple panne sexuelle passagère. Cette dernière est expérimentée par tous les hommes et plus répandue chez les hommes âgés. On parle de dysfonction érectile quand il y a une impossibilité permanente de mettre en route ou de maintenir une érection suffisante pour permettre un acte sexuel épanouissant. Concrètement, on considère que si ce problème survient pendant trois mois, il est recommandé de s’adresser à un médecin. L’absence d’érection spontanée nocturne et l’impossibilité d’entrer en érection lors de la masturbation doivent également pousser à consulter sans tarder. Trop d’hommes pensent qu’ils vont pouvoir arranger le problème seuls et attendent parfois plusieurs années avant d’en parler avec leur médecin. C’est un mauvais réflexe. Un problème d’érection qui dure depuis longtemps peut entraîner des troubles relationnels supplémentaires qui compliqueront le traitement."
"De manière générale, la première chose à faire est d’en parler sans gêne à son médecin traitant. Beaucoup d’hommes abordent le problème en évoquant des symptômes "prétextes" comme une douleur aux testicules ou autres. Or, c’est lors de ce premier échange, par une analyse de la souffrance du patient, que le médecin pourra porter un diagnostic. Dans le cas plutôt rare ou l’homme sent qu’il s’agit d’une pathologie particulière au niveau de sa verge (problème de peau, douleurs empêchant l’érection, durcissement d’une partie du pénis…), il peut s’adresser directement à un urologue. Un sexologue peut également être utile lorsque l’origine des troubles de l’érection s’avère psychologique. Mais le médecin traitant est le premier interlocuteur vers lequel se tourner."
"Il y a trois ans, j'ai remarqué que mes érections étaient de moins bonne qualité. J'ai pensé que c'était dû à l'âge et au fait que la routine s'était installée dans mon couple, car nous étions ensemble depuis quinze ans. Progressivement, cependant, mes érections sont devenues tellement faibles qu'elles empêchaient une bonne pénétration. J'avais honte, et j'ai commencé à éviter les relations sexuelles avec mon épouse. De ce fait, notre relation s'est détériorée, et nous n'avons cessé de nous éloigner l'un de l'autre. Je savais que mon impuissance était à la base de nos problèmes conjugaux, mais je le refoulais et n'osais pas en parler, ni avec mon épouse, ni avec mon médecin. Finalement, la situation a dérapé et nous avons divorcé".
"Quelques mois après mon divorce, j'ai rencontré Eva, avec qui j'ai entamé une relation. Mais mes problèmes d'érection n'avaient pas disparu... Elle m'a conseillé d'en parler à mon médecin. Finalement, j'ai réalisé que si je ne le faisais pas, cette nouvelle relation allait également mal tourner. J'ai surmonté mon sentiment de honte et j'ai été voir mon médecin traitant, qui s'est montré très ouvert et m'a rassuré. Il m'a expliqué qu'un cercle vicieux s'était amorcé, mais qu'on pouvait faire quelque chose pour le briser. Il a constaté que ma tension artérielle était beaucoup trop élevée, et une prise de sang a également révélé que tant mon taux de cholestérol que mon taux de sucre étaient beaucoup trop élevés. Mon médecin traitant a instauré un traitement pour ces problèmes et m'a également prescrit un médicament pour améliorer mes érections. Depuis, je suis un autre homme, j'ai confiance en moi et je vis une parfaite relation avec Eva."
L’intervention d’un sexologue peut s’avérer efficace lorsque les troubles de l'érection font intervenir des facteurs psychologiques. Mauvaise image de son corps, sentiment d’insécurité par rapport à son couple, stress, peur de l’échec…
La thérapie chez le sexologue peut également être un complément à la prise en charge des causes physiques. Celles-ci peuvent en effet avoir un impact sur le mental, et vice-versa: il suffit parfois d’un problème d’érection isolé pour provoquer une peur de l’échec, et donc des difficultés à obtenir une érection la fois suivante.
Dans les deux cas, le médecin traitant est le premier interlocuteur vers lequel se tourner. Ce dernier pourra ensuite vous diriger vers un spécialiste ou un sexologue, en fonction du ou des problèmes à l'origine des troubles de l'érection.
Comme les psychothérapeutes, les sexologues s’efforcent de résoudre le problème au travers d’une thérapie par la parole. En posant des questions et en formulant des hypothèses, ils l’aident à s’ouvrir à de nouvelles idées. Cette prise en charge n’implique donc aucun examen physique.
Nous abordons notamment la place qu’occupe la pénétration dans la sexualité au sens large, ou nous expliquons au patient pourquoi il n’y a aucune raison d’avoir honte d’un échec ponctuel. Nous lui donnons également des exercices à faire chez lui ou des instructions à suivre. Il peut s’agir de la lecture d’un livre consacré aux techniques sexuelles, mais aussi, par exemple, d’une interdiction du coït. Cette mesure permet de ne plus se focaliser sur l’érection, mais sur les sensations qui accompagnent les caresses, et donc de réduire le besoin de "performance" lors des rapports.
En effet, car il ou elle peut contribuer à identifier précisément le problème et à le résoudre. En outre, les troubles de l'érection le/la concernent aussi.
Généralement, le patient suit une séance d’une heure toutes les semaines ou toutes les deux semaines, pour une durée qui peut aller de quelques mois à un an. Le traitement est différent pour chacun; il dépend de la problématique mais aussi de l’investissement de la personne. Pour résoudre le problème, il faut mettre soi-même la main à la pâte; le sexologue a surtout un rôle de soutien.
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Greta Bolle, sexologue-thérapeute relationnelle, Bruxelles.
Leen Delahaye, sexologue au sein du <a class="link" href="http://www.groepspraktijk-facet.be" target="\_blank">cabinet de groupe Facet</a>
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