Publié le 04/07/2025 à 15:10
Sur le papier, la réforme du ministre Frank Vandenbroucke semble alléchante: rendre les soins plus accessibles, réduire les suppléments d’honoraires, imposer des plafonds, obliger les médecins à se conventionner. En réalité, elle risque d’entraîner des effets pervers dramatiques.
Une médecine «gratuite»… mais à quel prix?Prenons un exemple concret: entre 9 et 15 ans, un orthodontiste ne pourrait facturer qu’environ 464 € pour la pose d’un appareil avec des plaquettes. Or, c’est bien en dessous du coût réel, rien que pour le matériel. Il faut compter entre 15 et 20 € par plaquette, soit jusqu’à 560 € pour 28 dents – sans même parler des arcs à remplacer chaque mois (environ 15 € pièce), de la colle spécifique (près de 200 € le tube) et, en cas de traitement par aligneurs transparents, des frais de laboratoire pouvant atteindre 2.000 €. Et tout cela sans même inclure les charges du cabinet, le personnel, ou le temps de soin… Résultat? Les cabinets d’orthodontie risquent de fermer, les jeunes ne seront plus soignés, ou devront aller à l’étranger.
Que fait-on des excès?Il existe certes des abus: quelques médecins demandent des honoraires excessifs. Mais ils sont très minoritaires. Comme le rappelle le Dr S.A., dermatologue: «Il y a des abus, bien sûr. Alors qu’on s’attaque à ceux-là! Mais la majorité d’entre nous travaille honnêtement.»
Moins de cabinets, moins de médecinsLes spécialistes s’inquiètent aussi pour les petits cabinets de proximité, souvent équipés de matériel coûteux et employant plusieurs personnes. «Ce n’est pas pour s’enrichir, mais pour survivre», explique le Dr F.G., également dermatologue. «Si les "suppléments d’honoraires"1 sont plafonnés à 25 %, beaucoup devront fermer. Et ce sont aussi les infirmiers, secrétaires, techniciens qui perdront leur emploi.»
Un système qui rappelle le Royaume-Uni… et ses dérivesLe ministre dit vouloir s’inspirer du modèle britannique (le NHS). Or, ce système est saturé, avec des délais de rendez-vous de plusieurs mois, des soins refusés passé un certain âge et une espérance de vie en recul. Certains patients sont forcés de camper des jours entiers devant un cabinet pour voir un dentiste. Faut-il vraiment copier cela?
Une médecine à deux vitesses… aggravéeAujourd’hui déjà, beaucoup de patients traversent la frontière en direction de la Belgique pour la qualité des soins, ou simplement pour obtenir un rendez-vous plus rapidement (contre parfois des mois voire des années d’attente dans leur propre pays). Si les professionnels belges sont forcés de mettre la clé sous la porte ou de devoir se délocaliser à l’étranger pour survivre, les délais exploseront encore. Cela signifie, concrètement, que le diagnostic de maladies graves pourrait être retardé de plusieurs mois, avec des conséquences tragiques.
Vers une médecine d’État: fin du libre choix?Autre mesure dénoncée: le ministre pourrait retirer le numéro INAMI d’un médecin sans passer par l’Ordre des Médecins, ni par la justice. Cela veut dire qu’un praticien pourrait perdre le droit d’exercer sur simple décision politique. Pire: pour vérifier les plaintes, l’État aurait accès aux dossiers médicaux des patients, brisant le secret médical.
Des abus dans le système, mais pas là où on le penseLe statut BIM (bénéficiaire de l’intervention majorée) est conçu pour venir en aide aux personnes les plus précaires. Lorsqu’il est attribué automatiquement, il remplit généralement bien cette mission. En revanche, lorsqu’il est octroyé sur base des revenus déclarés, seuls les salaires sont pris en compte – sans considération pour d'autres sources de revenus, comme les loyers ou les dividendes. Résultat: de nombreux abus, bien souvent au détriment de ceux qui en ont réellement besoin.
Qui décide, et pour qui?Beaucoup de médecins pointent aussi du doigt la collusion entre mutuelles et politiques, la mise à l’écart des professionnels de terrain dans les négociations et une réforme construite sans concertation. Un collectif apolitique, l’Union Belge des Prestataires de Soins, réunit désormais plus de 8.500 professionnels de la santé qui tirent la sonnette d’alarme. Médecins généralistes et spécialistes, dentistes, kinésithérapeutes, logopèdes, infirmiers, sage-femmes, psychologues, pharmaciens, étudiants… Tous souhaitent se battre ensemble, pour préserver le système de santé de notre pays avant qu’il ne soit trop tard.
Un appel à la compréhensionLes soignants ne se mobilisent pas pour leur confort. Il ne s’agit pas ici de défendre des privilèges. Les soignants le savent: un jour ou l’autre, chacun peut devenir patient et avoir besoin de soins. Ils se battent pour pouvoir continuer à soigner dans de bonnes conditions. Pour que les soins restent accessibles, humains et de qualité. Les médecins mobilisés ont pris leurs responsabilités: des solutions sont mises en place pour assurer la continuité des soins essentiels. Les urgences resteront assurées. Les situations médicales prioritaires seront prises en charge.
Caroline Vrancken
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