L’avis du Dr Jochen Nijs, gastro-entérologue à Saint-Trond (Sint-Trudo Ziekenhuis).
Dans le cas de la maladie de Crohn, de la rectocolite ou d’autres maladies intestinales chroniques inflammatoires (MICI), le suivi du traitement par les patients est souvent moins bon qu’attendu par les gastro-entérologues. Pourquoi? Comment convaincre les personnes souffrant d’une MICI de ne pas décrocher, les encourager et les informer sur les effets bénéfiques d’un traitement à long terme?
L’adhérence thérapeutique en cas de MICI est-elle bonne?
«L’ensemble des gastro-entérologues surestiment l’adhérence thérapeutique, communément appelée compliance, de leurs patients, et ce, que ce soit dans la maladie de Crohn, la rectocolite ou toute forme de MICI. Si vous me demandez ce qu’il en est de l’adhérence de mes patients, je pars du principe qu’ils suivent scrupuleusement le traitement que je leur ai prescrit. Et pourtant, dans la pratique, ce n’est pas le cas! Il est crucial d’en tenir compte car il s’agit d’une pathologie qui ne se guérit pas, mais dont nous pouvons atténuer les symptômes. Le patient peut – à tort – avoir l’idée, lorsqu’il est en période de rémission, qu’il en est débarrassé. Je suis très étonné du faible taux d’adhérence qui ressort de récentes études scientifiques menées en la matière!»
Comment justifier que certains traitements bénéficient d’un meilleur suivi par le patient MICI que d’autres?«Un traitement biologique sous forme intraveineuse, administré en milieu hospitalier, aura une adhérence thérapeutique optimale. Nous avons, dans ce contexte, toutes les données en main et pouvons contrôler si le patient est venu en rendez-vous ou pas. C’est d’ailleurs rare qu’un patient ne vienne pas ou décroche. Par contre, avec les formes orales ou sous-cutanées, nous avons moins d’emprise sur le suivi du traitement, d’où certains problèmes d’adhérence.»
Comment encourager les personnes atteintes de MICI à être plus adhérentes à leur traitement?«Il faut savoir que, lorsqu’on entame un tel trajet de soins, c’est pour longtemps. Le patient doit en être averti, informé et conscientisé. Il faut prendre le temps de bien lui expliquer les tenants et aboutissants de la maladie, ses effets secondaires potentiels, etc. Il faut conclure une sorte de partenariat. Le patient doit coopérer, il est acteur de son traitement, il doit être impliqué dans son trajet de soins. Il doit être conscient qu'il devra prendre un traitement et avoir un suivi médical tout au long de sa vie. Il convient, dès lors, de choisir le traitement le plus approprié pour lui en fonction bien entendu de l’évolution et du stade de sa maladie, mais aussi de sa vie professionnelle, privée, de ses déplacements, etc. Cela augmentera l’adhérence thérapeutique. Je donne toujours une préférence d’un point de vue médical, mais ce n’est pas toujours ce traitement-là qui sera d’emblée adopté. Parfois, on orientera spécialement certaines personnes atteintes de MICI vers une thérapie intraveineuse plus exigeante pour justement éviter ce manque d’adhérence thérapeutique. C’est réellement au cas par cas. Si d’autres pathologies sont présentes, une approche multidisciplinaire sera envisagée, car n’oublions pas que c’est tout le système immunitaire qui est touché. Il peut y avoir des symptômes concomitants en lien avec la rhumatologie, la dermatologie, etc.»
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