Nathalie, 41 ans
Lorsque Nathalie, qui souffre de dépression, se réveille dans un service psychiatrique après une tentative de suicide il y a une quinzaine d’années, c’est le choc. Pourtant, elle veut reprendre le travail une fois rétablie…
Lorsque j’ai été hospitalisée, ma colocataire a informée mon employeur de ce qui s’était passé. Cela partait d’une bonne intention. Dans le secteur des soins de santé, où elle travaillait comme infirmière, on est beaucoup plus ouverts à ce genre de situation et cela ne pose pas de problèmes. Il en allait tout autrement dans le grand magasin où je travaillais depuis deux ans: là-bas, on voulait des employés sans problèmes et capables de fonctionner normalement. J’ai été licenciée peu après avoir repris le travail suite à ma première dépression majeure. Officiellement pour cause de réorganisation… mais on m’a clairement fait comprendre que l’entreprise ne pouvait pas se permettre d’employer des personnes souffrant de troubles psychiatriques.
Oui, mais je n’ai jamais mentionné à un employeur que je souffrais de problèmes psychiatriques: échaudée par ma première expérience, j’avais peur que plus personne ne veuille m’engager. Les personnes qui souffrent de troubles mentaux sont manifestement considérées comme peu fiables. De mon côté, j’avais besoin de gagner ma vie et je ne voulais pas non plus me retrouver complètement isolée, et j’ai chaque fois essayé de travailler. Mais, de fait, j’ai changé souvent d’emploi. Pour l’instant, je ne travaille pas parce que cela ne va vraiment plus. Personne au boulot n’a jamais su que j’étais dépressive, même pas mes collègues.
C’était quelques années plus tard. Cela m’a fait très mal, surtout au début, lorsque le conseiller médical m’a dit clairement qu’il valait mieux que je ne reprenne pas le travail. Il déduisait cela du rapport de mon psychiatre, alors que j’étais venue pour demander de recommencer à mi-temps… D’après lui, je serais probablement incapable de travailler pendant plusieurs années, voire même définitivement. C’était vraiment une douche froide.
Je pense que la dépression, les troubles bipolaires et, de manière générale, les pathologies psychiatriques restent un grand tabou. J’en veux pour preuve la discrimination professionnelle dont j’ai été victime. Aujourd’hui, je vais bénévolement témoigner dans des écoles (surtout dans les sections de sciences humaines) ou dans le secteur social, pour expliquer aux gens ce que c’est que de souffrir d’une maladie mentale. Bien sûr, ce n’est qu’une goutte d’eau dans l’océan, mais nous pouvons au moins expliquer aux jeunes que nous sommes des hommes et des femmes comme les autres. Je suis également un cours pour devenir experte du vécu en santé mentale. Les autorités s’attachent actuellement à définir le contenu de cette fonction en l’adaptant aux besoins du patient: travail à temps partiel, maintien de l’allocation lorsque cela ne va plus… Voir se développer cette initiative me fait beaucoup de bien. Le bénévolat est évidemment très gratifiant aussi, mais c’est dommage qu’il ne soit pas du tout rétribué.
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