Mathieu Pauly, président du Fabry Support Group
Mathieu Pauly est l’un des tout premiers patients Fabry à avoir bénéficié du traitement par enzymes de substitution en Belgique. C’était en 2001, à l’issue d’un long parcours du combattant pour parvenir à mettre un nom sur ce dont il souffrait.
Je fais partie d’une génération de patients Fabry qui ont généralement vécu sans diagnostic pendant plus de vingt ans. La maladie a alors eu le temps de faire son chemin et d’occasionner des dégâts irréversibles.
Mes symptômes ont débuté en 1971, quand j’avais 12 ans: la chaleur m’était insupportable, je souffrais de crampes abdominales et de douleurs aux extrémités des doigts et des orteils ainsi qu’aux articulations des genoux. J’ai été hospitalisé à plusieurs reprises sans que les médecins ne puissent établir un diagnostic. Ils disaient que c’était «dans ma tête». J’ai dès lors essayé de vivre avec ces douleurs sans en parler à qui que ce soit.
Une quinzaine d’années plus tard, j’ai été admis aux urgences pour d’intenses et soudains troubles de l’équilibre. Tout tournait devant mes yeux, j’étais incapable de marcher et la moitié de mon visage était paralysée. Après avoir été ausculté par de multiples spécialistes, un diagnostic est tombé: sclérose en plaques.
J’ai vécu avec ce diagnostic «par défaut» pendant plus de dix ans tandis que mes symptômes (intolérance à la chaleur, sensations de fourmillement et douleurs aux mains et aux pieds) étaient toujours bien présents. Un jour, les médicaments que l’on m’a prescrits pour calmer ces douleurs ont provoqué de fortes réactions cutanées au niveau de mon dos. Le dermatologue que j’ai consulté n’avait vu qu’un seul patient Fabry au cours de sa carrière, mais il a immédiatement reconnu dans ces lésions les angiokératomes typiques de la maladie. C’est ce qui a permis de poser le diagnostic. À l’âge de 38 ans, j’entendais le terme «maladie de Fabry» pour la première fois de ma vie.
Aujourd’hui, la maladie de Fabry est de mieux en mieux connue. Des associations de patients s’organisent et s’unissent avec d’autres groupements dédiés aux maladies rares pour aider à sensibiliser le corps médical et le grand public. Le «bon» diagnostic est généralement posé plus tôt et un traitement spécifique - l’enzymothérapie - peut être prescrit plus précocement.
Si ce traitement par enzymes de substitution ne guérit pas la maladie de Fabry, il permet d’en freiner l’évolution et améliore la qualité de vie au quotidien. Moi, par exemple, je souffre d’hypertrophie cardiaque: la paroi du ventricule gauche de mon cœur s’épaissit. Grâce au traitement, cette atteinte cardiaque s’est stabilisée. Si je n’avais pas été soigné de manière adéquate, j’aurais peut-être été victime d’une deuxième thrombose… En outre, au jour le jour, le traitement atténue mes problèmes digestifs (crampes abdominales, constipation, diarrhée…).
Bien sûr, il y a encore des points à améliorer! Un exemple? Si le traitement est entièrement pris en charge par l’INAMI, la demande de remboursement doit être renouvelée chaque année: un processus contraignant et qui va à l’encontre de toute logique!
L’enzymothérapie elle-même peut s’avérer fastidieuse pour certains patients parce que le traitement est administré par perfusion en hôpital de jour une fois toutes les deux semaines. Mais, ici encore, des pistes sont investiguées. Les firmes pharmaceutiques qui produisent ces traitements étudient par exemple l’intérêt et la faisabilité d’une formule «à domicile». Une infirmière à domicile se rendrait chez le patient pour poser la perfusion et intervenir en cas de problème. La formule constituerait un sérieux atout en termes de qualité de vie et de confort. Les patients qui travaillent ne seraient par exemple plus obligés de prendre deux jours de congé par mois pour suivre leur traitement. On le voit, les choses bougent, lentement mais sûrement, pour les patients Fabry.
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