Publié le 01/03/2017 à 12:36
On le sait, la kinésithérapie est une pierre angulaire de la prise en charge de la maladie de Pompe. Mais, concrètement, quels sont les exercices à privilégier et ceux à éviter?
À l’occasion de la dernière réunion du groupe Maladie de Pompe de l’ABMM (Association Belge contre les Maladies Neuro-Musculaires), Virginie Kinet, kinésithérapeute, a fait le point sur les bonnes pratiques à adopter:
«Les bénéfices de la kinésithérapie sur la maladie de Pompe sont multiples», rappelle-t-elle. «Sur le plan orthopédique, la kiné permet de prévenir les rétractions musculaires qui, à la longue, peuvent entraîner des douleurs. Le kinésithérapeute travaille sur la souplesse musculaire et articulaire par le biais d’étirements.»
«Afin de limiter la perte de force musculaire, on fait travailler les muscles pour prévenir l’atrophie liée à leur sous-utilisation», poursuit Virginie Kinet.
«Sur le plan fonctionnel, enfin, la kinésithérapie peut aider le patient à "fonctionner" le mieux possible dans ses activités de la vie quotidienne (monter les escalier, s’asseoir…).»
Si les experts sont unanimes quant aux bénéfices des étirements dans la prévention des rétractions, les bonnes pratiques liées aux objectifs musculaires et fonctionnels peuvent être davantage sujettes à controverse. Un consensus sur les aspects à privilégier a cependant été établi1.
«Il est généralement recommandé d’établir un programme d’exercices combinés comprenant du renforcement musculaire et un travail en aérobie, c’est-à-dire des exercices d’endurance comme la marche, le vélo, le tapis roulant ou encore la natation», indique Virginie Kinet.
«Ces activités doivent être d’intensité modérée (60 à 70% de la fréquence cardiaque maximale) afin de pouvoir être tenues sur une durée relativement longue, généralement de quelques minutes à une demi-heure. On peut encourager le patient à réaliser des exercices d’endurance supplémentaires en dehors des séances de kiné, mais il est primordial de respecter son rythme.»
«Des études suggèrent en outre d’intégrer à ce programme un travail de gainage de la ceinture abdominale et des muscles dorsaux2,3. Cela nécessite bien sûr des adaptations par rapport aux exercices proposés aux personnes qui ne sont pas malades, mais c’est une piste à explorer parce que le gainage semble augmenter la stabilité de l’ensemble du corps dans les activités de la vie quotidienne.»
«Les activités fonctionnelles ne doivent pas être oubliées. Un exemple? Les squats, qui permettent de reproduire le mouvement que l’on effectue pour s’asseoir ou se lever, tout en travaillant les quadriceps. Le patient peut aussi amener ses propres suggestions: quelqu’un qui aurait peur de ne pas parvenir à se relever après une chute, par exemple, pourrait tirer profit d’exercices de transferts de la position couchée à la position assise.»
«Autre spécificité propre aux maladies évolutive: le kinésithérapeute peut aider et encourager le patient à trouver des mouvements compensatoires nécessaires à certaines fonctions. Par exemple, monter les escaliers marche par marche au lieu de le faire de manière alternée.»
«Lors des séances, mieux vaut éviter les exercices avec contractions excentriques, où le muscle s’allonge lorsqu’on le contracte comme quand on descend les escaliers. Réaliser ce type de mouvement de manière répétée dans le cadre d’un travail de renforcement musculaire n’est pas recommandé pour les personnes atteintes de la maladie de Pompe parce que cela peut être traumatisant pour leurs muscles.»
«Dans tous les cas, les objectifs de la kinésithérapie doivent être clairement énoncés avant de débuter la prise en charge, ce qui aide à maintenir la motivation sur le long terme», précise Virginie Kinet.
«On recommande un rythme de 3 à 5 séances de kinésithérapie par semaine, espacées d’au minimum 1 jour de repos», indique Virginie Kinet.
«Lors de ces séances, il est très important de prévoir des périodes de repos, en alternant le travail des jambes et des bras par exemple. De la sorte, on ne fatigue pas excessivement le muscle.»
«Parvenir à éviter tant la sous-utilisation du muscle que sa sur-stimulation nécessite des essais et des ajustements pour savoir jusqu’où on peut aller. C’est un subtil équilibre que le kinésithérapeute et son patient doivent trouver ensemble. Une bonne relation entre les kinésithérapeutes du domicile et les équipes des centres de références qui suivent le patient est aussi primordiale.»
«Le kinésithérapeute a par ailleurs aussi un rôle d’éducateur thérapeutique à remplir, le but étant d’apprendre aux patients à modérer l’intensité de leur effort en se basant sur leurs sensations.»
«On le voit, un bon dialogue avec son kinésithérapeute est essentiel pour parvenir à s’accorder sur les exercices les plus appropriés à son cas», observe Virginie Kinet.
«Par ailleurs, si les objectifs fixés au départ sont indispensables, il faut aussi pouvoir les adapter à la fatigue du patient, aux périodes où il sature, à l’évolution de sa pathologie, aux zones les plus atteintes… Il est dès lors indispensable que le courant passe bien entre le patient et son kiné! Mieux vaut également opter pour un cabinet à proximité du lieu de domicile et de travail afin de limiter au maximum les obstacles à une prise en charge régulière et au long court.»
1. Cupler EJ, et al. 2012, Muscle Nerve 45:319-333
2. Van den Berg et al. Orphanet J Rare Dis. 2015; 10:87
3. Favejee et al. Arch Phys Med Rehabil 2015;96:817-22
Aude Dion
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