La surconsommation d’antalgiques, plus d’une fois par semaine, entraîne une chronicisation des céphalées. Les maux de tête ne deviennent pas nécessairement plus violents ou plus douloureux car l’antidouleur garde un effet antalgique. Mais les migraines sont plus fréquentes, entrecoupées de maux de têtes non migraineux, parfois quotidiens.
On parle de céphalées induites par l’abus d’antalgiques quand elles sont présentes plus de 15 jours par mois et que l’arrêt des médicaments antalgiques permet une réduction de la fréquence des crises.
Le phénomène des céphalées induites par l’abus d’antalgiques concerne environ 2% de la population générale. Il s’agit le plus fréquemment de patients migraineux sévèrement atteints, dont la fréquence des crises est élevée dès le départ et qui surconsomment des antalgiques… parce que les migraines ne sont plus supportées ou parfois même préventivement pour éviter leur survenue.
Par ailleurs, des études ont démontré que certains migraineux présentaient une prédisposition à développer cette complication. Il s’agit d’une hypoactivité dans le cortex orbito-frontal, la partie de notre cerveau qui nous permet de dire «non» et qui contrôle le circuit du plaisir et de la récompense. Cette anomalie cérébrale favorise la dépendance.
Le sevrage est la seule solution. En effet, l’arrêt des traitements antalgiques doit être complet d’emblée. Le patient peut bien entendu présenter des céphalées liées au sevrage durant plusieurs jours, ce qui peut être atténué par certains médicaments prescrits pendant 2 semaines, le temps du sevrage physique. Le succès du sevrage est de 90% dans les deux premières semaines: la majorité des patients (60%) ont une réduction importante des maux de tête après ces 2 semaines. Mais le risque de rechute n’est cependant pas négligeable: jusqu’à 30% après 1 an.
Les médicaments incriminés ne sont pas tous égaux.
En première ligne, il y a les antalgiques combinés, qui contiennent un antalgique (paracétamol, etc.) combiné à de la caféine et/ou de la codéine. Ce sont les plus difficiles à soigner car les céphalées de sevrage durent au moins 15 jours et les rechutes sont les plus fréquentes.
Viennent ensuite les triptans, médicaments spécifiques de la migraine. Ils induisent plus rapidement le phénomène de chronicisation mais les céphalées de sevrage ne durent que quelques jours.
Les produits ayant le moins de risque d’entraîner des céphalées par abus de médicaments sont les antirhumatismaux (ibuprofène, naproxène). Ils peuvent même protéger certains migraineux contre ce cercle vicieux.
Mais, de manière générale, un conseil: méfiez-vous des antalgiques. Lorsque la migraine devient fréquente, consultez un spécialiste pour bénéficier d’un traitement préventif adéquat (traitement de fond).
Interview réalisée par Coline Wellemans, mise en ligne le 01 juillet 2015.
Le but de la toxine botulique (ou botulinique) est de faire passer un patient migraineux du stade chronique au stade épisodique. Le traitement par injections de Botox® est donc envisagé uniquement pour les personnes souffrant de migraines chroniques, c’est-à-dire ayant plus de 15 jours de céphalées par mois dont au moins 8 crises de migraines.
La toxine botulique reste donc un traitement de fin de ligne. Tous les autres traitements antimigraineux doivent avoir été tentés avant d’opter pour la toxine botulinique: les traitements préventifs médicamenteux, la neurostimulation non invasive, et surtout le sevrage médicamenteux en cas d’abus d’antidouleurs.
Ce n’est pas la panacée. Les injections de Botox® (31 sites d’injection au niveau de la tête, de la face et de la nuque) sont efficaces chez 40-50% des patients. Il ne s’agit donc pas d’une révolution mais d’une possibilité supplémentaire dans l’arsenal thérapeutique pour des patients très invalidés et difficiles à traiter. Les migraineux chroniques qui répondent au traitement sont partiellement soulagés mais ne sont généralement pas totalement délivrés de leurs crises.
Par ailleurs, la toxine botulique n’est pas un traitement définitif. Même chez les patients réceptifs, les injections doivent être répétées régulièrement. Et la durée de l’effet est très aléatoire d’un individu à l’autre. Selon un protocole établi, les deux premières injections sont espacées d’environ trois mois. Si les symptômes du patient ne sont pas significativement améliorés après deux séries de 31 injections, on abandonne le traitement. S’ils sont améliorés, les injections sont ajustées selon la réponse thérapeutique. L’objectif est d’espacer le plus possible les injections, notamment à cause de leur prix élevé: une injection coûte près de 300€ et, sauf la première série d’injections qui est offerte par le fabricant, les autres traitements ne sont toujours pas remboursés par l’INAMI. Si le patient passe de la migraine chronique à la forme épisodique, il peut à nouveau répondre à des traitements médicamenteux préventifs, ce qui permet de suspendre la toxine botulique.
Il y a très peu de risques pour l’injection faite près des petits muscles dont la fonction est avant tout «esthétique». Même s’ils sont un peu paralysés, il n’y a pas de répercussions désagréables. Il arrive rarement que les injections faites trop près de l’œil paralysent le muscle releveur de la paupière. Les injections près du muscle temporal peuvent exceptionnellement entraîner une faiblesse de la mastication. Mais l’effet n’est jamais définitif. Une fois la toxine botulique éliminée, après quelques semaines ou quelques mois, les muscles retrouvent leur force normale.
Selon moi, les injections doivent être pratiquées au moins par un neurologue, et je dirais même plus par un neurologue spécialisé dans les migraines. Il est important de bien connaître la migraine chronique pour utiliser la toxine botulinique de façon adéquate et l’intégrer dans une approche thérapeutique multimodale.
Interview réalisée par Coline Wellemans. Publié le 01 juillet 2015.
Pr Jean Schoenen: Il n’y a pas que la douleur, bien entendu. Et pas non plus seulement les auras, qui sont de mieux en mieux connues. C’est bien plus que cela: un mal-être, des nausées, une sensibilité au bruit, à la lumière, au mouvement…
Pr Schoenen: Chez les personnes migraineuses, il y a un déséquilibre entre le travail du cerveau et ses réserves énergétiques. Les personnes souffrant de migraines ont en effet 15 à 20% d’adénosine triphosphate en moins. Cette substance est le carburant de toutes les cellules. C’est pour cela que tout ce qui va augmenter le travail du cerveau – la fatigue, le manque de sommeil, le stress… - augmente le risque de crise de migraine. La douleur est d’ailleurs le signal que quelque chose ne va pas.
Pr Schoenen: Ce n’est pas complètement impossible, mais la personne affectée ne sera pas performante à 100%. Dans une étude menée à Liège, 46% des patients disaient qu’ils devaient arrêter complètement leurs activités jusqu’à ce que la crise passe. Les autres continuaient avec des performances diminuées. Mais si tous les migraineux quittaient leur poste à chaque crise, ce serait pire que les grèves!
Pr Schoenen: La première chose, pour les personnes qui subissent plus de trois crises de migraine chaque mois et qui n’obtiennent pas un bon résultat avec les simples antidouleurs ou antimigraineux, est de suivre un traitement de fond. Celui-ci diminue la fréquence des crises de migraine, soit en augmentant un peu le stock d’adénosine triphosphate, ou en diminuant le travail de fond du cerveau en le rendant moins réactif, moins excitable.
Par ailleurs, il faut apprendre à adapter sa vie à sa maladie, c’est-à-dire respecter une hygiène de vie qui permettra au cerveau de garder ses forces:
Pr Schoenen: Une crise de migraine n’est pas visible en soi, mais la personne affectée a un comportement différent: les traits tirés, pâle, elle bouge moins, se frotte la tête, a des nausées… Il est donc probable que ceux qui l’entourent se rendent compte que «quelque chose ne va pas». Parler de sa migraine va donc rendre les choses plus compréhensibles. Et aussi, probablement, faciliter la vie des autres migraineux que toutes ces personnes qui comprennent croiseront dans le futur.
Article rédigé par Marion Garteiser, journaliste santé.
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