"Il est vrai qu'il n'a jamais vraiment été habitué à s'occuper des tâches ménagères: les courses, la préparation des repas, le ménage, ce n'était pas vraiment pour lui" raconte Marianne, sa fille ainée. "Au début, nous ne nous sommes donc pas inquiétés de ses oublis, de ses repas sautés ou de la poussière qui s'accumulait dans la maison. Nous avons rapidement mis en place un système d'aide avec repas apportés à domicile, aide ménagère... Malgré cela il continuait à décliner: oubli de la date, désintérêt par rapport à l'actualité... Même le bricolage qui était sa passion, il l'a arrêté. Nous nous sommes vraiment alarmé le jour où un voisin nous l'a ramené un soir à 21 heures: il avait retrouvé notre père errant dans son jardin."
"Bien entendu, le mot "Alzheimer" a été évoqué pour expliquer la dégradation intellectuelle qui était la sienne. Mais notre médecin, intrigué par la tristesse qu'exprimait notre père, a décidé de débuter un traitement par antidépresseur nous expliquant qu'une dépression pouvait parfois mimer les symptômes d'une maladie d'Alzheimer. Et là... miracle, notre père a commencé à retrouver non seulement le sourire mais aussi sa mémoire, son intérêt pour ce qui l'entoure. Il vit actuellement seul à la maison, entouré bien sûr, et se débrouille très bien."
Deux ou trois électrodes, dans lesquelles passe une impulsion électrique pendant 8 secondes maximum, sont placées sur le front du patient sous anesthésie. Ce traitement est répété 2 à 3 fois par semaine, avec un total de 8 à 12 séances. Si les scientifiques ne connaissent pas encore avec précision la façon dont une impulsion électrique permet d'améliorer un état dépressif, ils savent néanmoins qu'elle entraîne un certain nombre de modifications biologiques dans le cerveau, dont la libération d'hormones et de neurotransmetteurs et la stimulation de facteurs de croissance provoquant la création de cellules nerveuses dans l'hippocampe.
C'est exact. Ces dix dernières années, plusieurs études scientifiques ont confirmé l'efficacité supérieure de l'ECT. L'ECT est parfaitement sûre et il n'existe aucune contre-indication absolue. De plus, une étude récente a pointé la satisfaction des patients dépressifs ayant bénéficié d'un traitement par ECT. C'est la raison pour laquelle l'ECT ne doit pas être considérée comme le tout dernier recours. En cas de symptômes psychotiques, de pensées suicidaires et de dépression associée à des symptômes moteurs prononcés, par exemple une diminution ou un ralentissement anormal des mouvements (hypokinésie), il faut envisager l'ECT bien plus rapidement. Les patients présentant ces symptômes réagissent en effet encore plus vite et mieux à l'ECT.
Depuis l'introduction de l'ECT en 1938, la technique a fortement évolué. Grâce à l'utilisation généralisée de l'hypnose et des décontractants musculaires, les complications graves comme les déchirures musculaires ou les fractures font définitivement partie du passé. La migraine et la nausée sont encore fréquentes, mais sont soulagées par un traitement médicamenteux simple. Les effets secondaires cognitifs comme des troubles de la mémoire sont aussi diminués et généralement de nature passagère. Enfin, le type et la longueur de l'impulsion électrique sont sans cesse optimalisés. Tous ces éléments ont considérablement réduit le nombre d'effets secondaires, sans nuire à l'efficacité du traitement.
Sienaert P., What We Have Learned About Electroconvulsive Therapy and its Relevance for the Practicing Psychiatrist. Can J Psychiatry, in press (probablement janvier 2011).
Une faible proportion de patients déprimés fait la démarche de consulter un médecin. Dans le public, la dépression continue à avoir la réputation d’une maladie honteuse, associée à un état de paresse, à une faiblesse de caractère ou à un risque d’évolution vers la folie. Au terme de dépression, on préfère en général épuisement, fatigue psychique ou burn-out. En bref, on se défend d’être déprimé. Le sentiment de honte explique que les patients aient autant de difficultés à consulter leur médecin pour exprimer une souffrance psychique.
Seuls deux tiers des déprimés suivis en consultation sont correctement diagnostiqués. Généralement, la personne dépressive se présente chez son médecin généraliste avec des plaintes somatiques comme des troubles du sommeil, des difficultés gastro-intestinales, de la fatigue ou une perte de poids. Et parmi les patients traités pour un syndrome dépressif, un tiers seulement reçoit un traitement antidépresseur. À cela s’ajoute le fait qu’une proportion importante de patients traités ne prend pas son traitement antidépresseur correctement. Le patient arrête prématurément son traitement ou l’oublie à plusieurs reprises. Malgré les recommandations concernant la durée du traitement (au moins 6 mois après avoir atteint la rémission), de 30 à 68% des patients arrêtent leurs antidépresseurs après 3 mois, ce qui augmente les risques de rechute.
Il peut être expliqué par les effets secondaires des médicaments, le prix du traitement, la résistance du patient ou de sa famille à la prise d’antidépresseurs ou le manque d’informations transmises sur la maladie et le traitement prescrit. Il est important de faire changer les mentalités et d’améliorer la communication autour de la dépression.
Article publié le 24/03/14.
"J'ai commencé à me sentir perpétuellement fatiguée. Normal, me suis-je dit, avec tout ce que je vis. J'ai ensuite fait des cauchemars de plus en plus fréquemment; j'ai commencé à me réveiller vers trois heures du matin sans pouvoir me rendormir. Un jour, au boulot, j'ai craqué et je me suis mise à pleurer sans pouvoir m'arrêter. Je me sentais si triste, si démunie. Je n'avais plus le courage et plus la force de rien. Même faire les courses était devenu un calvaire. J'étais bien trop réservée pour oser consulter un psychiatre ou pour en parler à mon médecin généraliste."
"Au bout de six mois, ce sont mes enfants, pourtant petits, qui m'ont fait comprendre que leur maman n'était plus la même, plus celle qu'ils connaissaient. J'ai alors décidé de consulter. J'ai entrepris une psychothérapie et suivi un traitement par antidépresseurs. Au bout de quelques semaines, je me sentais mieux et rapidement, je me suis retrouvée telle que j'étais: pleine d'énergie et de peps. Malgré cela, j'ai tenu à poursuivre pendant près de deux ans ma psychothérapie. J'en ai gardé une seule leçon: pourquoi tarder à demander de l'aide? Il n'y a aucune raison de souffrir en silence."
Quand j’ai dû être suivie médicalement à cause d’une dépression, les médecins et le personnel infirmier ont dû me convaincre d’accepter d’être traitée par un psychiatre!
Ce n’était pas facile au départ. Mais, après bien des hésitations, j’ai décidé de ne pas remettre chaque fois en question l’utilité de la consultation. Je me sentais tellement mal dans ma peau.
Et si j’osais en parler à mes parents, j’avais tellement peur qu’on me prenne pour une folle que j’ai longtemps hésité avant d’oser en parler avec mes amis. J’avais aussi remarqué que mes parents hésitaient à en parler ouvertement aux autres membres de ma famille.
Les amis auxquels j’aurais voulu me confier à propos de ma dépression m’évitaient. Ils ne me comprenaient pas et me regardaient bizarrement. Les gens n’ont pas envie de savoir que vous vous sentez mal dans votre peau. Ils préfèrent que vous leur disiez que tout va bien. Et surtout ils veulent que vous écoutiez leurs problèmes. Mais quand vous êtes dépressive, c’est très difficile de parler de choses agréables, car vous broyez du noir et vous êtes complètement découragée. Et c’est comme ça que j’ai perdu la plupart de mes amis.
Il y a encore toujours un tabou autour de la maladie psychiatrique et psychique. Quand les médias parlent des maladies psychiques, c’est généralement négatif et toujours spectaculaire. Songez aux affaires judiciaires largement étalées dans la presse (meurtre au parachute, Kim De Gelder). Ces histoires trouvent un écho dans ma famille et auprès de mes amis qui projettent ce qu’ils entendent sur moi.
Beaucoup de personnes sont encore persuadées qu’une dépression n’est pas une maladie et que vous devez vous ressaisir. Elles pensent que vous n’avez qu’à actionner une sorte de bouton pour que la dépression se termine du jour au lendemain.
La plupart de mes amis actuels sont eux aussi psychiquement fragiles. Et je remarque que beaucoup sont dans le même cas que moi. Je comprends parfaitement qu’il n’est pas facile d’être ami avec une personne qui souffre d’une fragilité psychique. Nous avons beaucoup de hauts et de bas. Il y a des moments où nous nous coupons du monde, et donc aussi de nos amis. Ceux qui ne comprennent pas ce qui se passe dans notre tête ou pourquoi, ressentent cela, à tort, comme un rejet.
Cet article a été réalisé en collaboration avec l’association Ups&Downs
«Quand j’étais jeune, j’adorais la gymnastique. Puis, je me suis mariée et mes enfants sont nés et je n’ai plus eu le temps d’en faire. Il y a quelques années, mon fils a eu un accident. Je suis tombée dans une profonde dépression. Lorsque j’ai commencé à remonter la pente, j’ai ressenti le besoin de bouger. Mon fils était dingue de sport. Je me suis alors inscrite à un cours de gymnastique. Et maintenant, le sport agit comme une drogue sur moi. J’ai besoin de ma dose hebdomadaire d’exercice physique, elle me permet d’affronter toutes les difficultés. Pas de fitness, mais de la gym et du jogging. Régulièrement, donc pas seulement quand j’ai le temps. Non, il faut établir un planning précis et fixer les jours à l’avance. Dans mon cas, c’est le dimanche, le mercredi et le vendredi.»
«Il est impossible de se sortir seul d’une dépression. Un traitement multidisciplinaire est indispensable. Dans mon cas, de longs entretiens avec le psychologue et la prise d’antidépresseurs… Mais, l’acteur principal de la guérison reste la personne dépressive. Quelle que soit la profondeur du trou dans lequel vous êtes tombé, quelle que soit la solidité de la corde que l’on vous tend, si vous ne la saisissez pas, vous n’en sortirez jamais. Le processus de guérison peut prendre du temps et être très progressif.
L’entourage, aussi, joue un rôle important dans le combat contre la dépression. Lorsque la phase aiguë est passée et que la personne sort de sa coquille, c’est à l’entourage de la stimuler. Il ne faut pas lui demander à tout bout de champ comment elle se sent. Non, laissez-la raconter ce qu’elle veut raconter au moment où elle le désire. Les langues se délient parfois toutes seules quand on se promène ou qu’on fait du jogging ensemble.»
«Au début, j’étais tellement stressée que j’aurais pu provoquer un accident. J’ai aussi fait à plusieurs reprises des crises d’hyperventilation. J’ai appris à décompresser et à me maîtriser grâce à la gymnastique et au jogging. La lecture m’aide aussi. Il faut trouver des occupations que vous aimez faire… Mais ce qui est essentiel, et je n’insisterai jamais assez là-dessus, c’est de sortir et de bouger. Se promener ou courir, selon votre condition physique. Tout le monde sait qu’après une journée de travail assis au bureau, on est plus fatigué qu’après une demi-journée de jardinage. Le grand air fait des merveilles… après une dépression aussi.»
Les personnes dépressives manquent d'énergie et se sentent fatiguées. Elles prennent souvent peu de plaisir à effectuer des activités et restent parfois même alitées. Elles sont donc moins actives physiquement, ce qui entraîne une détérioration de leur condition physique et une aggravation de leurs pensées négatives. Elles sont ainsi prisonnières d'une spirale négative.
L'exercice physique diminue la sécrétion de cortisol et d'adrénaline, les deux hormones du stress. Parallèlement, bouger exerce un effet positif sur le niveau de sérotonine et la quantité de dopamine dans le cerveau. La sérotonine et la dopamine sont deux neurotransmetteurs qui influencent l'humeur. De plus, l'exercice physique améliore la condition physique, l'image de soi et la confiance en soi. Il réduit aussi le risque d'obésité, de diabète et de maladies cardiovasculaires comme l'accident vasculaire cérébral (AVC). Un avantage non négligeable. Les personnes dépressives ont en effet plus de risques de développer ces maladies.
Cela dépend en grande partie de leur condition physique. A l'UPC'KULeuven, Campus Kortenberg, nous aidons les patients à améliorer leur condition physique très progressivement, en fixant des objectifs raisonnables. Les exercices demandent 50% à 60% maximum de leur capacité physique, qui est déterminée par un test à l'effort. Les patients généralement alités commencent par de courtes promenades. Les patients dont les symptômes de dépression sont moins sévères peuvent nager, rouler à vélo, se promener ou faire des exercices de relaxation. Ces sports se font de préférence en groupe afin d'aider les personnes dépressives à sortir de leur isolement.
Ce carnet permet aux patients de constater qu'ils ont amélioré leur condition physique grâce à leur propre volonté et à leurs capacités. Comme l'exercice physique améliore l'image de soi et la confiance en soi, il a donc aussi un important effet psychologique.
Depuis 12 ans, je suis en couple avec Jean qui souffre aussi d’une maladie psychique. Être tous les deux dépressifs ne nous a pas entraînés dans une spirale négative mais a apporté une sorte de dynamique à notre relation: quand l’un va mal, l’autre est plus fort et peut le soutenir. Tous les deux, nous avons fait régulièrement des séjours à l’hôpital mais jamais simultanément. En 12 ans, cela signifie quand même quelque chose!
À chaque admission, l’un était là pour s’occuper des enfants, pendant que l’autre était mal. J’ai 4 enfants d’une relation précédente et nous avons ensemble une fille. Les deux aînés ont quitté la maison et j’ai déjà un petit-fils.
Mon fils de 14 ans et ma fille de 12 ans habitent encore à la maison. Je vois bien qu’ils ne veulent pas raconter à leurs copains et copines que leurs parents ont des problèmes psychiques. Pourtant, ces dernières années, je me suis dit que c’était mieux d’en parler à notre entourage.
Les gens savent encore tellement peu de choses sur la dépression et les autres maladies mentales. J’ai toujours dit à mes enfants qu’ils ne devaient pas avoir honte que leur maman soit dépressive. Mais je sens bien qu’ils sont gênés. Ils préfèrent raconter que leur maman ne travaille pas parce qu’elle souffre du dos. Ce qui est aussi le cas mais n’est pas la raison pour laquelle je n’ai plus d’activité professionnelle. Ils préfèrent donner à leurs amis une explication d’ordre physique plutôt que psychique.
Pendant les grandes vacances, mon fils a été admis 5 semaines en pédopsychiatrie pour une mise au point. Ses copains ne pouvaient absolument pas être au courant. Les ados méprisent les jeunes qui ont des problèmes psychologiques. Mais quel mal peut-il y avoir à se faire examiner pour des problèmes de concentration et d’étude?
Il a raconté à ses copains qu’il partait 5 semaines à l’étranger. Il était certain ainsi qu’aucun ne l’appellerait pour se voir ou ne viendrait lui rendre visite. Cela m’a un peu choquée. Je lui en ai parlé mais je ne le force pas car je ne veux pas non plus que ses amis le stigmatisent et le harcèlent à ce propos.
Les gens ne tiennent généralement pas compte du fait que les dépressifs sont des personnes normales, qu’une dépression peut arriver à tout le monde. Je sais d’expérience que la vie n’est pas facile pour beaucoup de gens: on travaille toute la journée, on rentre chez soi, on fait le ménage, on s’occupe des enfants et on recommence le lendemain! Beaucoup préfèrent ne pas songer à l’éventualité qu’un beau jour la machine pourrait s’enrayer. Peut-être est-ce trop interpellant pour certains? Je le vois bien avec mes frères: ils sont toujours prêts à m’aider sur le plan pratique mais à parler de ce qui ne va pas chez moi, non!
Cet article a été réalisé en collaboration avec l’association Ups&Downs. www.upsendowns.be
«Mon divorce m’a épuisée tant moralement que physiquement. Comme je ne supportais plus de vivre à proximité de mon ex-mari, j’ai déménagé à la côte. Je travaille dans une grande banque et il m’était facile de me faire muter dans une agence locale. Mais, ma famille habitait loin de là et, de tout notre cercle d’amis, peu sont restés en contact avec moi. Au début, je me suis sentie très seule. Même si c’est moi qui avais pris la décision de m’éloigner, j’avais l’impression que tout le monde m’avait laissé tomber. Je ne pouvais pas me permettre de ne pas travailler et c’était la seule chose pour laquelle je mettais encore le nez dehors. Nous étions en hiver, il faisait sombre et froid. Dans mon nouvel appartement aussi.»
«Mes nouveaux collègues me considéraient avec méfiance et mon nouveau patron n’était pas des plus commodes. Tout devait rouler comme il l’avait décidé. Comme je voulais me montrer sous mon meilleur jour à mes collègues, je gardais tout en moi. Je ne parlais à personne de mon divorce, c’était trop douloureux. Et je ne voulais surtout pas souffrir. Je me disais que tout finirait par s’arranger, que je devais seulement donner du temps au temps. De fil en aiguille, je n’arrivais plus à dormir, j’étais de plus en plus fatiguée, je n’avais plus envie de rien et tout, même sortir de mon lit et me laver, me paraissait insurmontable… et je ne voulais pas prendre de jours de congé car j’étais nouvelle à l’agence. J’étais désespérée, sans espoir d’amélioration.»
«C’est ma voisine du dessus qui m’a trouvée un dimanche matin en pleurs sur le palier. Je lui ai tout raconté et elle m’a convaincue de prendre rendez-vous chez son médecin généraliste en m’assurant que c’était une femme très gentille et très compréhensive. Le médecin m’a immédiatement réconfortée: «Vous souffrez d’une dépression, mais cela se soigne. Vous ne devez pas tout me raconter aujourd’hui». Les deux premiers mois, je l’ai vue chaque semaine en consultation, ensuite tous les mois et, aujourd’hui encore, tous les trois mois.»
«Je n’aime pas prendre des médicaments. Mais, lors de ma deuxième visite, la doctoresse m’a expliqué que ma dépression était une véritable maladie et que, vu l’intensité des symptomes, j’avais besoin d’antidépresseurs. Heureusement, elle ne s’est pas contentée de prescrire des médicaments, elle a aussi pris le temps de m’écouter. Elle me réservait à chaque fois une demi-heure. Au début, c’est surtout de la frustration que j’exprimais, mais après un certain temps j’ai pu relativiser davantage ma situation. Je m’entends maintenant bien avec mon directeur d’agence qui apprécie ma ponctualité et mes nouveaux collègues savent désormais qu’ils peuvent compter sur moi. Je sors de temps en temps avec ma voisine du dessus prendre l’air à une terrasse maintenant que la météo se réchauffe. J’espère pouvoir profiter pleinement cet été du soleil, de la mer et de la plage...»
Lorsque j’ai été hospitalisée, ma colocataire a informée mon employeur de ce qui s’était passé. Cela partait d’une bonne intention. Dans le secteur des soins de santé, où elle travaillait comme infirmière, on est beaucoup plus ouverts à ce genre de situation et cela ne pose pas de problèmes. Il en allait tout autrement dans le grand magasin où je travaillais depuis deux ans: là-bas, on voulait des employés sans problèmes et capables de fonctionner normalement. J’ai été licenciée peu après avoir repris le travail suite à ma première dépression majeure. Officiellement pour cause de réorganisation… mais on m’a clairement fait comprendre que l’entreprise ne pouvait pas se permettre d’employer des personnes souffrant de troubles psychiatriques.
Oui, mais je n’ai jamais mentionné à un employeur que je souffrais de problèmes psychiatriques: échaudée par ma première expérience, j’avais peur que plus personne ne veuille m’engager. Les personnes qui souffrent de troubles mentaux sont manifestement considérées comme peu fiables. De mon côté, j’avais besoin de gagner ma vie et je ne voulais pas non plus me retrouver complètement isolée, et j’ai chaque fois essayé de travailler. Mais, de fait, j’ai changé souvent d’emploi. Pour l’instant, je ne travaille pas parce que cela ne va vraiment plus. Personne au boulot n’a jamais su que j’étais dépressive, même pas mes collègues.
C’était quelques années plus tard. Cela m’a fait très mal, surtout au début, lorsque le conseiller médical m’a dit clairement qu’il valait mieux que je ne reprenne pas le travail. Il déduisait cela du rapport de mon psychiatre, alors que j’étais venue pour demander de recommencer à mi-temps… D’après lui, je serais probablement incapable de travailler pendant plusieurs années, voire même définitivement. C’était vraiment une douche froide.
Je pense que la dépression, les troubles bipolaires et, de manière générale, les pathologies psychiatriques restent un grand tabou. J’en veux pour preuve la discrimination professionnelle dont j’ai été victime. Aujourd’hui, je vais bénévolement témoigner dans des écoles (surtout dans les sections de sciences humaines) ou dans le secteur social, pour expliquer aux gens ce que c’est que de souffrir d’une maladie mentale. Bien sûr, ce n’est qu’une goutte d’eau dans l’océan, mais nous pouvons au moins expliquer aux jeunes que nous sommes des hommes et des femmes comme les autres. Je suis également un cours pour devenir experte du vécu en santé mentale. Les autorités s’attachent actuellement à définir le contenu de cette fonction en l’adaptant aux besoins du patient: travail à temps partiel, maintien de l’allocation lorsque cela ne va plus… Voir se développer cette initiative me fait beaucoup de bien. Le bénévolat est évidemment très gratifiant aussi, mais c’est dommage qu’il ne soit pas du tout rétribué.
Cet article a été rédigé en collaboration avec l’association Ups&Downs
En Belgique, une personne sur dix souffre d'un trouble psychique: schizophrénie, troubles bipolaires, dépression... Autrement dit, 10% de la population belge est en contact avec le monde psychiatrique! Les patients sont bien entendu soignés mais on oublie souvent que leurs proches souffrent également. Pour un père ou une mère, découvrir que son fils de 16 ans souffre de schizophrénie est une catastrophe.
En tant que psychiatre, j'ai été confronté très tôt au drame vécu par les proches. Cette souffrance m'a frappé d'autant plus que rien n'était fait pour ces personnes. Les familles ont longtemps été laissées pour compte et n'étaient que rarement associées au traitement. Or une grande partie des soins est devenue extrahospitalière impliquant les familles plus qu'avant. Nous avons donc décidé en 92 de créer des groupes de parole pour les proches.
Les proches de personnes atteintes de maladie mentale outre leur souffrance sont envahis par des sentiments de solitude, de culpabilité et d'impuissance. La charge d'un patient est émotionnellement et financièrement lourde et perturbe souvent très profondément la vie familiale. Ces groupes leur permettent de se rassembler et de partager leurs problèmes. De cette façon, ils arrivent à se réconforter. Ils ne sont plus seuls!
Les proches se rassemblent une fois par mois pour partager leurs expériences. Il ne s'agit pas d'un groupe de thérapie mais bien de groupe de parole. Il n'y a d'ailleurs pas de meneur mais simplement une personne qui contrôle le temps de parole et organise la rencontre.
On constate en général une amélioration au bout d'un an ou deux. Les proches se sentent alors mieux et ne culpabilisent plus. Il y a évidemment toujours de nouveaux malades et, chaque année, de nouvelles personnes font appel à notre association. Il faut donc être continuellement sur la brèche.
Pour plus d'informations, 02/644.92.00 ou www.similes.org.
La plupart des gens pensent que guérir d’une dépression, c’est une question de volonté
J'ai traversé un épisode dépressif à la naissance de mon fils, il y a quinze ans. Je ne me suis pas vraiment rendu compte de mon état. Ce sont mes proches qui me l’ont fait remarquer. J’étais constamment fatiguée, je n’avais ni l’envie ni la force de faire quoi que ce soit. La plupart des gens pensent que guérir d’une dépression, c’est juste une question de volonté. Ils n’ont pas conscience de la souffrance physique qui accompagne cette maladie: on est prisonnier de son corps. C'était surtout culpabilisant vis-à-vis de mon fils, dont je ne parvenais pas à m'occuper alors qu’il avait besoin de moi.
Des proches attentionnés mais impuissants
Mes proches me portaient beaucoup d’attention et discutaient avec moi de ma dépression, mais ils n’avaient pas les mots pour m’aider. Quand on vit une dépression, on n'arrive pas à prendre le recul nécessaire par rapport à soi-même et à ce qu’on ressent. On a souvent l'impression que les propos de nos amis et de notre famille sont influencés par l'affection qu'ils nous portent. Même si leurs mots sont pertinents, ils ne vont pas forcément faire mouche.
Une aide extérieure pour faire face à la dépression
J'ai sollicité l'aide d'une psychiatre qui était aussi psychothérapeute. Au début, c’était difficile de parler, mais elle m’a rapidement mise à l’aise. La thérapie est essentielle pour aller mieux. Il faut trouver et comprendre l’origine du problème, pourquoi on ne va pas bien, c’est difficile, mais c’est ça qui va générer le déclic nécessaire pour s’en sortir. Il ne faut pas craindre de faire appel à une personne extérieure, médecin ou thérapeute, qui aura plus de crédit à nos yeux et qui aura la neutralité nécessaire pour nous aider. Mais il n’en reste pas moins important de communiquer avec son entourage et de partager sa démarche. Leur soutien reste indispensable!
Article publié le 24/06/2014
"L’objectif de notre ligne téléphonique (0800/32 123) est d’aider des personnes à surmonter un moment difficile… Il y a énormément de possibilités d’aides pour les personnes qui pensent au suicide mais il faut en général attendre. On téléphone d’abord, on prend rendez-vous ensuite et enfin on rencontre un aidant, un psychologue, un psychiatre... Travailler par téléphone permet d’aider les personnes immédiatement au moment où la crise est aiguë, au moment où un éventuel passage à l’acte est imminent."
"Oui. Il s’agit d’un des avantages du téléphone. Nous ne connaissons pas les personnes qui appellent et nous ne cherchons pas à les identifier. Elles peuvent donc nous dire ce qu’elles ont sur le cœur, nous raconter leurs difficultés en toute liberté! Et cette liberté est fondamentale."
"Il est difficile de savoir précisément quel est le résultat suite à un appel. Les personnes téléphonent puis nous n’avons en général plus de nouvelles. Par contre, il arrive que certains nous rappellent pour nous remercier de les avoir aidé."
Oui. Les volontaires sont formés puis supervisés pendant toute leur activité au Centre. On ne demande toutefois pas de connaissance particulière. Nous avons d’ailleurs toujours besoin de nouveaux effectifs: une équipe de bénévole est toujours en mouvement. Si des personnes sont intéressées, elles peuvent contacter le secrétariat du Centre au 02/640.51.56."
"Oui, en effet. Le Centre a de nombreuses autres activités en dehors de cette ligne téléphonique. Nous faisons de l’information et de la sensibilisation auprès de différents publics. Nous pouvons également aider les personnes qui ont fait une tentative de suicide et intervenir auprès des proches lors de deuils. Et nous avons un Centre de documentation qui est accessible au public et un site web: http://www.preventionsuicide.be."
«C’est certainement un peu bizarre mais je remercie mes dépressions. Même si je ne les ai pas voulues, elles m’ont appris à relativiser. Moi qui suis une anxieuse, j’ai appris à mieux me connaître. Un exemple typique. Parce que j‘étais trop perfectionniste. Et il ne faut pas. Je l’ai compris aujourd’hui. L’erreur est humaine. Il faut pouvoir l’accepter et en voir le côté positif. Je trouve, par exemple, que les étudiants qui n’ont pas réussi leurs examens mais ont fait vraiment de leur mieux méritent tout de même un encouragement. Ils peuvent être fiers d’eux. C’est ainsi que j’ai appris à accepter mes limites.»
«Aujourd’hui, je vois toujours le verre à moitié plein et pas à moitié vide, ce qui fait rire mon compagnon. Je tiens cela de ma mère. C’est d’elle que j’ai reçu le plus de soutien pour surmonter mes dépressions. Elle ne s’est jamais appitoyée sur mon sort mais ne m’a jamais laissé tomber. Malheureusement, elle est décédée il y a quelques années.
Faire partie d’un groupe d’entraide? Très peu pour moi! Vous vous retrouvez avec des personnes qui ressassent leurs pensées dépressives. Non merci! J’ai recherché la compagnie de personnes qui se sentaient bien dans leur peau. Je me suis inscrite dans un club de personnes veuves et de célibataires. Je m’y suis fait des amis qui m’ont, en quelque sorte, forcée à ne pas rester enfermée chez moi. Nous allions ensemble au théâtre, nous balader ou faire du tennis. Cela m’a beaucoup aidée à l’époque.»
«Je profite aujourd’hui des petites choses de la vie quotidienne et je ne veux plus tout avoir. Même si la société nous propose chaque week-end des tonnes d’activités que nous ne pouvons manquer sous aucun prétexte. Je suis indépendante et j’ose désormais dire que je n’ai rien fait du week-end par exemple. Il m’a effectivement fallu un temps fou avant de pouvoir avouer ce genre de chose sans culpabiliser. Aujourd’hui, je n’ai plus honte de dire haut et clair que je me la suis coulé douce le week-end en bouquinant, en profitant du soleil, en faisant du jogging, du lèche-vitrine…»
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